Le BRM 200 km d’Andrésy – 10 mars 2019

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Début mars. Je n’ai pas roulé depuis la fin de l’année dernière. Depuis fin novembre et mon BCN / BPF de Touraine. Aujourd’hui c’est le début du cycle de mes brevets qualificatifs pour ce Fameux Paris-Brest-Paris, auquel je vais me coller une fois de plus. Pas de grande motivation, mais 200km ce n’est pas le bout du monde, même si ce circuit est assez vallonné. Une formalité ennuyeuse. Je n’aime pas cette longueur bâtarde. Pour moi, ce n’est pas vraiment de la longue distance. Et pourtant, quand le monde devient rugueux, ingrat, sans aucune bonté, 200km peuvent déjà être presque une odyssée.

Bref, dimanche 10 mars, 7h, Je démarre dans un petit groupe pour une vingtaine de bornes. Et puis l’arrêt obligatoire de ma première pause pipi se fait sentir. Rien de grave, en repartant je suis repris par d’autres cyclos. Le vent fort est déjà bien emmerdant de travers, et c’est tout un exploit de ne pas se pisser dessus !  Les bourrasques s’engouffrent dans le boulevard des plaines, voie royale des dents creuses des villes qui s’espacent. Sur la route encore gorgée des pluies de la nuit, s’étale une purée de grenouille, puis plus loin dans le crachin, une autre bouillie de vers de terre. Un des cyclos du groupe casse un rayon dans un bruit sec, nettement perceptible malgré le souffle, un son de cloche tibétaine. Un peu plus loin, une crevaison. Il y en aura une bonne poignée, mais pour une fois la poisse ne semble pas de mon côté. Je joue au chat et à la souris sur la route vallonnée avec mon petit groupe. Le petit village de Chaussy est plaisant, malgré le temps maussade. À la faveur des vieilles pierres, je perds mes compagnons. Petite hésitation dans Bray-et-Lu. Encore un joli village…sauf que je ne trouve pas la route indiquée sur le road-book ni ma carte. Tant pis, je prends à droite, logiquement dans la bonne direction. Au gré des villages formant un abri relatif au vent, je peux entendre le chant des oiseaux qui change de la monotonie du souffle furieux mugissant à mes oreilles. Milieu de matinée, la pluie s’arrête plus tôt que prévu. Le vent en rafales n’est pas encore totalement présent, mais très pénible. Le terrain vallonné n’arrange pas ma progression. La douleur aux genoux est déjà intense. L’air est encore très chargé d’humidité, bien que la pluie n’ait pas l’air décidée à revenir… pour l’instant. Le vent se fait furieux, 75km/h selon la météo, presque une tempête et ça se sent bien ! Cette deuxième moitié d’étape devient vraiment ingrate, pénible au point de n’avancer qu’aux environs de 8km, voire parfois moins. J’ai en tête mon retour calamiteux du BRM 600 de Grenoble en 2015 ; il y a des coups de vent qui valent des coups de hache. Quitter Saint-Rémy par sa longue grimpette faisant gagner une bonne centaine de mètres de dénivelé est un acte de bravoure, un exercice d’équilibriste titubant. Chaque fois qu’une très rare voiture me double, je prends son aspiration et savoure la dizaine de seconde d’éternité pendant laquelle je suis rendu à une route sans pesanteur, sans amarres pour me retenir, sans cette impression d’être au large en pleine tourmente, avec jusqu’aux bruits furieux du claquement de la grand-voile que me renvois mon imperméable malmené. Les panneaux indicateurs dansent dans les bourrasques, et je ne tiens debout qu’en tanguant moi aussi. Même uriner est un acte périlleux pour ne pas s’arroser ! Une quinzaine de kilomètres avant Les Andelys, je sers de poisson pilote à un cyclo encore plus en déveine que moi dans les bourrasques. Il s’accroche tant bien que mal, et nous atteignons ensemble le premier pointage par une série de lacets descendants redonnant un peu le moral.

En remontant sur les hauteurs, la sortie des Andelys redevient pénible. Les flaques des bas-côtés sont irisées, agitées de vaguelettes dignes d’un océan modèle réduit. Cette étape jusqu’à Gournay me paraît globalement plate, même si sur le papier elle est vallonnée. Le vent de travers, moins pesant, redonne des airs, même s’il a tendance à bien m’envoyer dans le bas-côté, m’obligeant à rouler au milieu de la voie. Comme l’arrivée à l’étape précédente, celle-ci se fait dans une belle cuvette, après une bonne série de lacets bien joueurs en descente. C’est le retour de quelques gouttelettes de pluie et j’atteins Gournay lovée au creux de sa vallée, à l’abri – relatif – du vent.

En repartant, je profite d’une pause à Saint-Germer-de-Fly pour avoir une preuve de passage dans le cycle de mes BCN / BPF, et prendre des photos de la collégiale ; le vélo se reposant dans l’herbe, plutôt que de risquer finir par terre. Pour vous dire, à l’entrée du village j’ai pris à plat en pleine figure, ce qui devait être je pense un panneau de bardage goudronné poussé par vent. Avec le casque et les lunettes, rien de grave à part d’être sonné un peu ; mais si je l’avais reçu par la tranche, je pense que cela aurait été une autre histoire ! La pluie revient pour une bonne heure, et j’en suis quitte pour une petite rallonge en ratant une bifurcation dont je me rends compte tardivement. Le vent est globalement très favorable. J’arrive à Noailles, village encore une fois blotti au creux de sa cuvette. Je tamponne mon carton jaune à 15h pile au bistrot qui baisse son rideau. Je sais que repartir de ce village que je connais bien offre une belle montée en passant par la route nationale. J’imagine que par les petites routes ce sera pareil.

Sans surprise, quitter Noailles est pénible dans la longue montée, toujours harcelé par le vent, qui reste contraire jusqu’à Ressons-l’Abbaye. Ensuite il passe de travers avec une tendance à m’envoyer au milieu de la route, ce qui n’est pas pour me rassurer. Les kilomètres passent, les villages tardent à s’égrener. Puis j’entre en région parisienne par le Vexin Français. Il reste 10km, le panneau d’entrée dans Courdimanche me fait sourire. Pas si court que ça ce dimanche, qu’est-ce que j’ai trouvé le temps long ! Andresy est tout proche, et avec le retour de l’urbanisation le vent se fait moins fort, mais la circulation revient elle aussi. Pas très intense, mais suffisamment pour être désagréable avec les conducteurs pressés de fin de week-end. J’ai comme un doute dans Cergy. Je suis pourtant toujours sur la D22, enfin je pense. A priori, j’aurais dû passer par Puisseux-Pointoise plutôt que par ici. Bizarre, j’ai dû rater quelque chose. Traverser une grosse agglomération comme Cergy sans être sûr de son chemin est le meilleur moyen de se perdre, mais finalement ça ne pose pas de problème… vu que j’étais resté sur la bonne route… en principe ! À toujours forcer, parce qu’avec un vent pareil même de travers il vous freine énormément, j’ai l’impression d’avoir fait le double de distance. Les quadriceps sont douloureux, mes genoux chauds comme jamais sur une si courte distance. Mes articulations ne valent plus rien, alors qu’elles n’ont jamais valu grand-chose… Tout le monde vieillit, ma bonne Dame ! Dans les derniers kilomètres, un cyclo me double. Je lui file au train. Rejoindre Andresy sera plus simple, c’est que je ne suis pas du coin ; moi. Finalement c’est bouclé en fin d’après-midi : 11h ½ pour 200km ; minable ! J’ai fait ce que j’ai pu, mais quand on est le passager d’un vent furieux, il faut savoir se montrer patient.

Pour en savoir plus :
le parcours ICI
le lien Openrunner LA
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