BCN et BPF : Béarn – 64 Pyrénées Atlantiques

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Kilomètres réalisés : 21550
Provinces BPF validées : 28 / 36
Départements BCN validés : 72 / 91

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Qui dit Pyrénées – Atlantiques ou pas – dit montagne, alors forcément sur cette province du Béarn réduite à un seul département, il faudra glaner une série de cols en chemin. Pas les plus hauts qu’on puisse trouver, aucun n’atteint les 2000m, mais avec moitié moins d’altitude le Marie Blanque peut se montrer très revêche, c’est un coriace ! Il y aura donc à gravir :

  • le Col de Saint-Ignace (169m)
  • le Col de Pinodieta (176m)
  • le Col dOsquich (500m)
  • le Col de Marie Blanque (1035m)
  • le Col du Porteigt (875m)
  • le Col de Labareille (1571m)
  • le Col d’Aubisque (1709m)
  • le Col du Soulor (1474m)

Allez, en route ! Gare de Bayonne en fin d’après-midi, moins d’une dizaine de kilomètres d’urbanisation toute plate, et il faut obliquer bien au sud pour fuir Biarritz par une première montée. La route devient vite vallonnée et plus qu’une promesse, la montagne se fait évidente en sortant d’Arbonne. Les nuages très noirs se confondent avec les sommets et me laissent entrevoir le pire pour cette soirée, prélude au déluge prévu pour demain. Le ciel encore sec est très menaçant, crépusculaire en tout début de soirée. Premier contrôle à Ascain sous une météo qui se maintient tant bien que mal. Courte mise en jambes, escale forcée de quelques heures, un petit tour en ville avant de repartir dans la nuit vers le pointage suivant, pour l’atteindre à l’aube.

Les heures ont passé, donc. Les ténèbres se sont épaissies, poisseuses. La route monte tout de suite en quittant le village. Les grillons murmurent doucement, chuchotent presque, comme s’ils ne voulaient pas déranger les ténèbres. La côte est longue finalement, et débouche sans interruption sur le Col de Saint-Ignace, point de départ du petit train de la Rhune. Je connais la route, j’y suis passé récemment au départ de la Flèche de France Hendaye – Paris avec mon Raleigh Super Course MkII de 1977 ; et je connais le coin depuis plus longtemps encore, avant son réaménagement en piège à touristes bien propret, bien lisse et plus accueillant, clinquant, mais ayant perdu son originalité, son caractère. Pauvre petit train à crémaillère avide lui aussi de sa part de tourisme de masse, et devenu Disneyland de pacotille. Pris dans mes pensées, Cherchebruit est totalement paisible… il n’y en a aucun pour peupler l’obscurité ! L’air est moite, sent la menthe sauvage. La route est tachetée, léopard des gouttes qui viennent de tomber. Je suis surpris par le petit raidillon en frôlant Ainhoa, et quelques kilomètres plus loin, le point de bascule du Col de Pinodieta se devine dans la nuit, sans panneau pour le concrétiser. Les nuages ne retiennent plus la pluie à l’approche d’Espelette, et c’est parti avant l’aube pour une journée totalement liquide ! L’aurore est sombre et triste, le jour peine à se lever sur le contrôle d’Itxassou.

Froid, humidité. Hésitation, pas envie de repartir. L’averse s’éternise, pas d’espoir que ça cesse, il faut y aller. Je quitte l’abri illusoire du auvent sous lequel je me suis réfugié. Le terrain se fait vallonné sous la forte pluie qui s’installe pour durer, ça commence à devenir une certitude. Une longue montée à 8 % se présente après Louhossoa. Les nuages, très bas, accrochés à la montagne étêtent le Mont Baïgura. Irissarry, la route est toujours bosselée. Le Col d’Osquich se fait désirer sous la pluie battante qui colle à mes lunettes. Où est-il passé, bordel ? Impatience, incompréhension. L’univers déjà liquide devient de plus en plus nébuleux, cotonneux, comme dans un rêve ; un mauvais temps pour un bien mauvais rêve ! Nuages particulièrement bas ou brouillard, l’impression est la même sous ces averses qui s’enchaînent sans s’arrêter, variant seulement en intensité depuis la fin de nuit, donnant de faux espoirs auxquels je finis par ne plus croire. Finalement la carte routière est fausse, l’altitude largement sous-estimée. Le panneau du sommet est placé bien plus haut et plus loin que prévu, encore une centaine de mètres de dénivelé à grimper pour arriver à sa pancarte indiquant les 500m d’altitude du col… au lieu des 392 supposés, ça fait une bonne différence sous le déluge. Sous un beau soleil le côté pittoresque de la plaisanterie doit se comprendre, mais là, je reste imperméable – c’est le cas de le dire ! – à cette forme d’humour. La descente n’apparaît pas si tortueuse sous la flotte, et passé Musculdy, à Ahetzia on est déjà retourné dans la vallée. Moment de répit en passant par Trois-Villes… qui mérite à peine d’être un seul village, puis une longue côte en deux temps se présente pour s’éloigner de Montory en passant par Tardets, premier bourg d’un minimum d’importance rencontré depuis longtemps. Fini la longue parenthèse plate depuis la descente du Col d’Osquich. Passé une butte après Arette, la route monte vraiment à Escot pour grimper directement vers le Col de Marie Blanque. Malgré son millier de mètres d’altitude – donc assez modeste dans l’absolu – il ne faudrait pas le sous-estimer. Bon, il démarre très facile sur les deux premiers kilomètres, reste raisonnable sur les trois suivants, puis devient de plus en plus âpre sur les cinq derniers, se cabrant de 8 vers 13 %. Déjà pas très conciliante par temps sec, l’ascension devient interminable et très exigeante sous la fraîcheur de la pluie battante et l’atmosphère fantomatique inquiétante de la brume. En haut, les vaches apparemment imperturbables quelles que soient les conditions météo, broutent paisiblement sous la flotte. Quelques-unes plus curieuses que d’autres viennent à la rencontre de celui qui s’est échoué-là avec son engin bizarre : moi ! Marie Blanque n’est pas le col le plus haut, de très loin, mais par contre il est très loin d’être facile. Dans la descente, les chevaux se mêlent aux vaches pour occuper la route. Leur confiance dans ma capacité à les éviter est un peu surestimée vu le temps de cochon. Au bout de quelques kilomètres en contrebas, le décor a pris un petit air de Vercors avec sa végétation rase aux différentes teintes de verts délicats, et la petite route qui semble serpenter à plat alors qu’on est reste en altitude. Pas le temps de rêver, à tout point de vue, pas la météo pour ! Descente prudente, retour dans la vallée à Bielle, petit temps de récupération en suivant la vallée du Gave d’Ossau. Une dizaine de kilomètres jusqu’à la sortie de Laruns, et c’est reparti à la hausse. La route grimpe, tortueuse. Les arbres en bord de lacets ne protègent rien de la pluie, bien au contraire, avec le vent qui les agite. Je passe par Eaux-Bonnes, non mais c’est une plaisanterie, là, avec toute cette flotte qui tombe sans jamais vouloir s’arrêter depuis l’aube… et même avant ! En arrivant à Gourette, déluge ou pas j’imagine, la vue du sommet en face est impressionnante. Je tente un abribus, voir si ça marche aussi pour les vélos. Perdu, je suis éclaboussé de partout. Ça n’abrite pas grand-chose, autant repartir. Les appartements de la station sont moches, à sec l’architecture ne doit pas paraître tellement plus belle. Le bonheur tient dans des cages à lapins et les skis aux pieds… J’ai l’humeur grincheuse, mais ce n’est pas moi qui ai commencé, c’est le ciel, d’abord ! Le plus dur de l’ascension est fait, mais qu’est-ce qu’il semble interminable ce Col d’Aubisque… Qu’est-ce qu’il serait beau aussi, avec une meilleure météo. Heureusement qu’entre les sections abruptes il y a des tronçons à la pente moins âpre.

Au sommet, rejoindre le Soulor serait une formalité, sans être pris dans la brume épaisse, sans la flotte qui s’obstine, sans le ravin qui guète juste au bord du bitume, sans ce jour crépusculaire qui va bientôt céder la place à la nuit… sans pour toutes ces raisons, avoir la possibilité de rater un lacet sur cette descente qui commence plongeante avant de s’assagir pour un sursaut plutôt rugueux à l’approche du sommet. Le plus gros de ce circuit est fait, le plus mouillé aussi, alors je me trouve une cachette au sec en chemin vers la vallée. Je m’arrête j’en ai marre, moral dans les chaussettes, trempées comme tout le reste. La pose s’impose naturellement pour la nuit, en espérant mieux pour demain, que la pluie se soit épuisée au moment de repartir. Quelques heures passent, le ciel s’éclaircit, la nuit est magnifique, enfin claire. Pas mal d’étoiles, je n’ai pas vu cela depuis longtemps. Grosse flemme avant de repartir, je contemple l’obscurité un moment, je médite. Tout est calme, silencieux, quelques gouttes se fracassent encore par terre de-ci de-là. J’y retourne. En finissant la descente du Soulor, bien vite le brouillard refait apparition. Tout s’efface dans la nébulosité, les étoiles comme le reste. Plus rien à voir. Une malédiction ? Non, un reliquat du déluge de la journée. Revenu en plaine, une fois la brume dissipée, les étoiles restent encore nombreuses. Nuit paisible. La route est bien roulante dans le contournement de Pau, même s’il se trouve quelques bosses de temps en temps. Pas de problème de circulation, je passe au large de l’urbanisation et des heures de pointe. Un gros chien blanc est couché en travers de la route. J’essaie de garder un pédalage souple pour ne pas déclencher d’hostilité de la part du pastou qui, ébloui par la lumière de mes torches, a sans doute du mal à associer mon avancée silencieuse à celle d’un cycliste… ou n’est-il simplement pas caractériel ! En tout cas l’animal reste calme, ne se relève même pas, et je passe tranquille. Sendets, Morlass, l’association des villages me fait sourire, forcément. Morlass c’est beaucoup dire, la petite montée pour y accéder n’est pas si terrible ! Une autre butte se présente aux portes de Saint-Laurent-Bretagne puis une autre en arrivant à Arzacq-Arraziguet pour une fin d’étape vallonnée menant au contrôle de Morlanne et à son château. L’église aussi mérite qu’on s’y attarde.

Je quitte le village en descente, moment de récupération bienvenu. Début d’étape tranquille pour redevenir progressivement vallonné. À Arthez-de-Bearn, un large panorama s’ouvre à gauche sur la campagne environnante… avec au loin les installations de la raffinerie de Lacq, tandis qu’au calvaire un raidillon très court permet de traverser le village. Comme à plusieurs reprises dans la matinée, je croise d’abord une petite pancarte de lieu-dit indiquant Mesplède, puis plus loin, bien séparé, le panneau d’entrée d’agglomération… la même ! Comment un bourg peut-il être à la fois lieu-dit et commune ? J’avais déjà remarqué cette interprétation locale de la géographie sur le BRM 1000 de Ménigoute en 2013. Ça commence à dater, à faire longtemps, mais visiblement rien a changé depuis. Étonnant. La traversée d’Orthez se fait par le franchissement d’une série de buttes. Le cimetière de départ m’interpelle, pour moi ce serait plutôt un lieu d’arrivée ! Sorti de la ville, le paysage est bien gondolé avec de très longues montées, et évidemment de longues descentes aussi, mais ce qui marque le plus ce sont évidemment les montées. Le panorama sur la gauche me rappelle la montagne pyrénéenne que j’ai parcourue hier sous la pluie battante. Vu de loin et sous le soleil, elle paraît tellement plus sympathique… Allez, sans rancune, j’y retournerai, mais pas cette fois ! Les bosses commencent à devenir usantes au fur et à mesure que le pointage de Sauveterre-de-Béarn s’approche. Cette fin d’étape est récompensée par une descente continue depuis Burgaronne.

Le Bearn est apparemment un pays où on roule traditionnellement sans pot. Aucun rapport avec la poule du Bon Roi Henri mais plutôt avec l’échappement. De la mobylette à la bagnole en passant par le scooter ou la moto, de 2 à 4 roues on adore apparemment faire du bruit. De nombreux véhicules croisés faisaient un barouf d’enfer qui semble difficilement conciliable avec le contrôle technique… et pourtant ! Dans la continuité de la fin d’étape précédente, celle-ci repart également bien vallonnée de Sauveterre, mais les bosses bien accentuées sont un peu plus courtes. Sinon, rien ne change au fait d’avoir à monter et descendre sans arrêt. En passant par Came, le pays de la chaise paillée, je traverse la Bidouze… et là, une question essentielle se pose : est-ce que Bidouze ça fait bien 24 ? On trompe l’ennui comme on peut ! La route se fait ensuite plus tranquille et roulante pour atteindre Mouguerre. La petite ville est déjà dans la continuité du tissu urbain bayonnais, la fin de ce circuit est proche.

Sur les hauteurs, au belvédère formé autour par la Croix de Mouguerre, le vaste panorama permet d’observer l’horizon sur trois quarts de tour. Bayonne et ses environs droits devant, et à droite, d’où je viens et par où j’ai commencé : le sommet de la Rhune quelque part dans la dentelle de pierres soulignant le ciel, et plus loin, sans doute peut-on voir la Marie-Blanque, le Soulor et l’Aubisque avec un peu d’imagination. Finis les pointages du Béarn, reste pour terminer, à rejoindre Bayonne tranquillement à une dizaine de kilomètres de là. En redescendant du monticule, la fin de la traversée du bourg est entièrement en pente pour arriver sur les rives de l’Adour concrétisant l’entrée de Bayonne. La gare est toute proche en suivant les rives, où la vermine à engins et vélos électriques se fait envahissante comme dans toutes les grandes villes.

Fin de cette province du Béarn que je n’ai pas pris de manière indépendante. Le département des Pyrénées Atlantiques est bouclé, mais pas cette sortie qui en est à peine à sa moitié ! En effet, ce retour à Bayonne va me servir, après avoir fait la jonction en remontant jusqu’à Capbreton, à retourner sur le circuit de Gascogne que j’ai dû abandonner de manière anticipée pour cause de canicule et d’impossibilité de prendre mon train du retour… sauf à le faire trois ou quatre jours plus tard, les fortes chaleurs menaçant de mettre en péril l’intégralité du matériel ferroviaire Occitan ! Principe de précaution sans doute poussé à l’extrême, mais bon, c’est comme ça. Pour terminer ce préambule, donc, je remonte plein nord sur l’ancienne nationale 10 en fin d’après-midi. Beaucoup de monde sur la route. Les portions de pistes cyclables sont les bienvenues pour la tranquillité, sauf que, comme hélas bien souvent, le tracé discontinu n’offre pas de grande cohérence. Le chemin plat peut surprendre avec quelques belles montées, en particulier au début, pour s’extraire de Bayonne. Beaucoup de bagnoles plus tard, doc, me voilà revenu à Hossegor en début de soirée pour rattraper la Gascogne… et pouvoir cette fois en finir avec cette province ; le récit est ici.

 

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