Les Flèches de France « vintage » : Le Mont Saint Michel – Paris

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Le cycle des Flèches de France « vintage »,
épisode 6.

 

le vélo pour revenir du Mont-Saint-Michel :Motoconfort DC8 (1968)
nombre de vitesses :2 x 4
développement maximum :7,90m (52/14)
développement minimum :3,70m (40/23)
poids du vélo :13,2kg
dénivelé du parcours :965m/100km

 

D’un point de vue météo, cette mi-avril s’annonce encore fraîche pour cette Flèche. Une nuit ne dépassant pas les 5°C et de rares averses sur toute la durée du parcours. De belles promesses ! Bon, si les averses sont rares, pourquoi pas, tout ira bien. Normalement, je dois suivre de près le flot des précipitations. Début de matinée, départ de Paris pour rejoindre le Mont-Saint-Michel, ou presque… enfin la gare de Pontorson, pas bien loin dans les terres. Seul problème, devant passer juste après les averses, logiquement l’avancée du train aurait dû croiser à un moment ou à un autre la flotte, et se confronter au plus gros de la troupe… sauf que là, rien, quasiment à sec ; en tout cas pas grand-chose, ça sent l’arnaque à plein nez !

C’est parti. Après une éternité sur les rails et un train qui fait curieusement demi-tour à Granville, Sortie de la gare de Pontorson donc, sous un ciel bien plombé. En ville, les dernières gouttes du crachin rencontré lors de l’avancée du train, s’épuisent. Petite mise en jambes hors parcours, une broutille. 10km à faire, plein nord en direction de la baie du Mont-Saint-Michel. Très vite, l’abbaye se détache de la plaine. Juchée sur son rocher, elle domine les environs, joue à cache-cache avec le paysage. J’arrive en début d’après-midi pour pointer sous une bruine insignifiante. Le site est encore boudé des touristes, seuls quelques cars sont échoués là, leurs occupants je ne sais où. La saison n’est pas encore lancée, de l’aveu de la commerçante chez qui je fais tamponner ma carte verte. Même si ce n’est pas bon pour les affaires, tant mieux, le calme ce n’est pas si mal. Allez, même sans le grand cirque des hordes déchaînées, bruyantes et sans-gêne, fuyons ; direction Paris !

Le début de cette première étape s’annonce facile, à plat, puis en s’éloignant de la baie pour rentrer dans les terres, le profil de la route devient légèrement vallonné. Le soleil fait une très provisoire apparition vers Les Chéris. L’asphalte détrempé brille de subtiles nuances, du satin à l’effet miroir, en fonction de la récurrence des averses. Par endroits, les plus anciens stigmates prennent l’allure de taches léopards s’asséchant. Passer devant l’ancienne gare du Pont d’Oir me fait toujours sourire… Le vélo, ça roule ma poule ! L’approche de Mortain se fait en terrain toujours vallonné. L’accès au site de contrôle se mérite par un beau raidillon après une longue descente en sortie de Romagny, qu’il faut tout de suite regrimper, sinon ça ne serait pas drôle. Les développements pourtant pas si limités de mon Motoconfort DC8 de 1968 – comparé à d’autres vélos que j’ai pu prendre sur des Flèches précédentes – rendent cette grimpette très pénible, mais je ne mets pas pied à terre… question de dignité avant tout !

Je repars sous une petite pluie fine, qui avait commencé à tomber avant mon arrivée en ville. Le temps de pointer la fait s’intensifier. S’échapper de Mortain demande, comme lors de son approche, à continuer de grimper ; comme si tout le village avait été construit en pente… Ou y avait glissé ! Un tout petit peu avant La Brousse-Pavée, un jardin sur ma droite est peuplé de grandes maquettes de monuments célèbres du patrimoine français. Les propriétaires ont dû y passer du temps… Notre-Dame de Paris côtoie notamment l’abbaye du Mont-Saint-Michel – symboles des deux bouts de mon parcours – dans une proximité insolite. L’ensemble surréaliste arrive malgré tout à ne pas faire, ni trop bric-à-brac, ni trop kitch. La route elle-même est toujours vallonnée, les côtes pas trop longues offrent des pourcentages raisonnables. Une très longue descente apparaît après Ger… qui n’est pas si pénible à remonter ; très longue quel que soit le sens, mais pas trop raide. J’atteins Saint-Pierre-de-Halouze – anonyme sans la présence d’un panneau d’entrée – par une petite route assez improbable et boueuse, sans autre indication que celle d’un poteau antédiluvien… qu’il fallait voir, à l’écart de la route. C’est à peu près le seul point de navigation délicat sur ce parcours, pour qui a encore le courage de rouler sans GPS ! D’un point de vue météo, la petite pluie fine qui tombe toujours par intermittence n’arrive pas trop à mouiller. Pas si désagréable donc, de l’avis des oiseaux également, à en croire leurs chants joyeux. Un arc-en-ciel apporte une touche de couleurs à la grisaille ambiante, et au terme d’une étape finalement bien bosselée, j’arrive à Putanges en début de soirée sous une nouvelle averse, un peu plus sérieuse cette fois-ci. Pas grand-chose pour pointer, personne dans les rues ; le village semble déjà endormi, alors c’est reparti sans s’attarder.

En reprenant la route, passé Montgaroult une trouée dans les arbres me révèle soudainement la beauté brute du manoir de Pommereux ; inattendu et magnifique ! La solide bâtisse de pierres aurait sans doute mérité mieux que de se trouver échouée au bord d’un simple croisement de routes. Nouvelle étape vallonnée où les montées deviennent progressivement de plus en plus longues, mais sans pourcentages extraordinaires. Dans le jour déclinant la pluie s’installe plus forte et plus tenace, elle me tiendra compagnie jusqu’au bout du chemin ! Je ne sais pas si ça y contribue, mais le tronçon d’Argentan à Gacé me semble très laborieux. Quelques kilomètres avant de traverser la ville, j’aperçois toutes ses lumières étalées sur la plaine, dans ce début de nuit humide. Malgré l’éclairage public, le château se détache à peine des ténèbres. Difficile de le contempler, alors je passe mon chemin. Les bosses se font de plus en plus longues à mesure que le contrôle de l’Aigle se rapproche.

L’étape est toute plate en repartant, à tel point qu’au terme d’une bonne soixantaine de kilomètres tranquilles, je me fais surprendre après Marcilly-sur-Eure et la traversée de la rivière, par la petite montée en direction des Christophes. La pluie est toujours là, plus drue et plus fraîche, à mesure que la nuit s’étire en longueur. La région parisienne se profile, et avec elle le contrôle d’Orgérus que j’atteins vers la fin de nuit. Rien d’ouvert, trop tôt pour tout, même pas un café pour se réchauffer. Pas de quoi s’attarder donc, alors c’est reparti pour la dernière étape.

Après une première moitié de routes tranquilles, comme toujours en se rapprochant de Paris, le parcours devient ennuyeux. Trop urbanisé, pas beaucoup d’intérêt, assez hostile aussi avec la pluie toujours obstinément là, et une circulation étonnante pour un début de week-end. Pour me changer les idées, la route reprend un tout petit peu de relief, avec en particulier une dernière montée entre les deux Neauphle, le Vieux et le Château. Après la longue traversée des zones commerciales et industrielles de Plaisir et des Clayes-sous-Bois, je m’égare, tourne en rond dans Villepreux. Je sillonne le village de long en large sans trouver la bonne direction. J’y passe un long moment, puis fini par faire – perdu pour perdu et faute de mieux, ma carte m’indique que c’est le plus raisonnable – un détour par St-Nom-la-Bretèche, avant de parvenir enfin à atteindre Noisy-le-Roi, à l’aube revenue, pour le dernier pointage.

 

Voir ICI pour la Flèche réalisée dans l’autre sens avec un vélo moderne.

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