Hélium H8 – (modèle 1968)

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Hélium, sous-marque de Peugeot et apparaissant furtivement sur les catalogues auTomoTo, n’est pas ce qu’il y a de plus prestigieux. Même pas un constructeur, même pas une marque à part entière, à peine une série économique, mais fiable et solide, et parfois davantage que certains modèles de la maison mère ! Ce H8 n’est pas totalement un traîne-couillon, mais le modèle d’entrée dans la ligne sport de Peugeot. Hé oui, sport tout de même, c’est la documentation d’époque qui le dit ! Bon, 3 vitesses c’est peu, et les garde-boue et l’éclairage en font surtout un demi-course du pauvre. Malgré tout, je trouve ce vélo attachant et élégant – en faisant abstraction de son état décrépi – avec son petit porte-paquet peint, ses pneus blancs Dunlop, sa selle en cuir aux flancs perforés. Comme presque tout ce qui est Peugeot ancien, on en a pour son argent point de vue kilos de ferraille ! Mais pas tant que ça : 13,8kg là où de vrais modèles Peugeot de l’époque peuvent en faire 2 de plus en étant à peine mieux équipés… comme quoi le bas de gamme n’est pas forcément si mauvais dans l’absolu !

Présentation :

En regardant le cadre, Hélium est écrit sur le tube diagonal et sur la colonne de direction. On pourrait croire que cela en fait une marque en tant que telle. En observant de plus près, on remarque un lion décorant le tube vertical. Ça rappelle quelqu’un d’autre, mais pourquoi pas, bien que d’un tracé stylisé et anguleux qui n’est pas familier dans l’iconographie Peugeot. Par contre, la parenté devient évidente avec les raccords de direction à créneaux ayant équipé plusieurs décennies de vélos Peugeot, et le sticker mentionnant « Tube spécial allégé Peugeot »… élément purement marketing – et mensonger, mais allégé par rapport à quoi ? À du plomb pourquoi pas. Tout est relatif, donc – de fameux cadres tellement allégés (comme sur ce Peugeot P50) qu’ils donnent souvent des vélos de plus de 15kg !

Celui-ci a l’air bien fatigué, les années ne l’ont pas épargné. Pas mal de choses rouillées, pas mal de choses grippées, pas mal de choses pourries ! Bon, une transmission 3 vitesses donc. C’est un peu court, mais c’est déjà ça. Un pédalier tout acier comme la rouille l’atteste, elle qui a fini par souder la chaîne en un seul bloc !

Le dérailleur, un Simplex Prestige de mauvaise réputation – totalement grippé lui aussi – en est pour l’instant prisonnier !

Sans être ni un 637 ni un 513, il ressemble fortement à un modèle 537 P.

 

 

Pour l’actionner, la manette – si elle avait été d’origine – aurait dû être en Delrin® blanc.

La roue libre à l’étagement standard de 16-19-22 n’offre pas trop la possibilité de cheminer longtemps en terrain vallonné.

 

Moyeux Atom en aluminium, papillons Huret Luxe en laiton chromé… et jantes acier ; les roues font dans le mélange des matières.

Pour cheminer longtemps, justement, la selle en cuir c’est bien, mais sur celle-ci on n’irait pas bien loin !

Le petit porte-paquet minimaliste est élégant, comme ces pneus blancs Dunlop rondouillards (en 700c x 28) aux bandes de roulement granitées. Même hors d’usage, ils donnent un air classieux à ce vélo moribond.

Il faudra essayer de les remplacer par quelque chose d’aussi sympa… et dénicher également un feu arrière au passage.

 

 

L’avant, encore présent, lui, est siglé du lion Peugeot.

 

 

 

 

Pour alimenter tout ça, il faudra trouver mieux que cette dynamo toute plastique qui semble trop récente.

 

Revenons au poste de pilotage avec cette potence Ava en aluminium, associée à un cintre basique en acier cloqué ; oh pardon, chromé !

Du scotch d’électricien est venu « en renfort » de la guidoline en ruban adhésif.

Les leviers de freins, basiques eux aussi, sont un équipement à pas cher. Bas de gamme comme les étriers Bebo tout acier en tôle emboutie, mais Bebo Sport tout de même, c’est écrit dessus, voyons !

Terminons cet état des lieux déprimant avec quelques exemples de l’omniprésence de la rouille sur la plupart des éléments de ce vélo. Les rares pièces en aluminium ne semblent pas oxydées en profondeur, c’est déjà ça… Et maintenant, au boulot !

La restauration :

Première chose à faire, s’occuper de la selle. Parce qu’il y a du travail à faire dessus, parce que c’est déjà un projet dans le projet, et parce que c’est l’élément le plus visiblement délabré. C’est parti ! Après un bon bain, le cuir est reformé. Les trous sur les ailes de la selle facilitent le travail pour tendre une ficelle. Oubliée quelques semaines le temps que le cuir sèche en profondeur, et on peut désassembler complètement la selle. Opération nécessaire pour traiter l’acier du croissant attaqué par la rouille, et changer les rivets de toute façon bringuebalants.

La fleur sera poncée pour atténuer les crevasses et écailles présentes sur le cuir (sain par ailleurs après son assouplissement)… Qui aura toujours meilleure mine.

Il ne reste alors plus qu’à repositionner la couverture sur l’armature à l’aide de rivets neufs. Voilà déjà une bonne chose de faite !

Au démontage, le châssis – en taille 55 – n’est pas si léger : 2,6kg pour le cadre, mais un poids plus standard de 865g pour la fourche. Vu l’état de l’ensemble, un traitement au Restom Protec Look 6100 – déjà testé sur ce Belfo – permettra de stabiliser la patine. Une fois la direction remontée, le projet peut vraiment commencer à prendre forme.

Après un gros travail de nettoyage – comme sur le reste du vélo – côté transmission le pédalier s’en tire bien, à l’exception d’une paire de clavettes récalcitrante. Les dents du plateau et les portées de roulements de l’axe indiquent que l’engin n’a pas forcément roulé énormément. À l’autre bout, l’affaire se complique pour le dérailleur. Crasseux et rouillé, le Simplex Prestige en Delrin® semble à première vue irrécupérable… D’autant plus que ses galets sont fendus. Vu leur état, logiquement le corps du dérailleur est aussi hors d’usage, surtout pour ce modèle aux attaches fragiles (les articulations sont évidées et les ressorts apparents sont masqués par des caches plastiques blancs)… Plutôt risqué pour faire davantage que le tour du quartier !

Après dégrippage du mécanisme puis changement des galets, contre toute attente le plastique du corps semble être resté assez robuste pour pouvoir être conservé. Un bon décrassage pour rendre le dérailleur présentable confirmera cette impression de solidité. Pour plus de polyvalence, notez le 3ème – et dernier – pignon de la roue libre Atom passé de 22 à 24.

La manette est le seul élément anachronique… mais de peu ! Un an ou deux au maximum, car ce modèle était déjà présent sur les catalogues Simplex du tout début des années 70.

Considérée dans l’ensemble du vélo, elle reste en harmonie. Rien de choquant, donc.

 

Le changement de gaines pose lui aussi problème. Celles d’origine sont plus fines que les modèles habituels : à peine plus de 4mm couche plastique comprise, là où la gaine ancienne standard en fait aussi 4… Mais une fois dénudée. Il faut donc enlever quelques millimètres à chaque extrémité, pour donner l’impression que la gaine est rentrée dans les butées alors qu’elle est seulement coupée à raz. En étant un peu soigneux, l’illusion est parfaite !

Du côté des roues, tout est aussi redevenu propre… même si le chrome perdu ne se réinvente pas !

Ces pneus blancs Kenda Kontender n’ont pas de sculptures trop agressives pour des pneus modernes. Ils remplaceront avantageusement les vieux Dunlop hors d’usage… Après un coup de peinture pour les rendre anonymes, car leur marquage bariolé n’est pas très discret.

Malheureusement, ce modèle à tringles rigides est très difficile à monter correctement sur d’anciennes jantes en acier… En tout cas sur ces Rigida Superchromix c’est un calvaire !

Point de vue éclairage, ce cabochon Soubitez en compagnie de sa dynamo Cibié sont conformes au catalogue d’époque… même si c’est un autre Catalux, le 8, qui équipe habituellement les Hélium H8 ; mais il n’y a aucune raison de douter de l’authenticité du socle resté sur le garde-boue. 

Va rouler !

À l’usage, cet Hélium H8 est très agréable à mener sur le plat, presque autant que cet autre traîne-couillon bleu Belfo sorti de restauration il y a peu. La teinte bleue, les pneus blancs et les 3 vitesses en feraient presque des jumeaux de sous-marques différentes, mais la comparaison s’arrête là. Ici, les développements ayant un peu plus d’allonge donnent un caractère plus sportif à ce vélo… Le catalogue d’époque disait donc vrai !

Avec son empattement long (de 106cm) ce vélo est particulièrement stable et semble virer un peu plus à la verticale en virages serrés. Une machine sécurisante et bien conçue donc, et qui finalement mérite bien mieux que d’être considéré comme un simple traine-couillon de sous-marque !

 

 

 

 

Reste pour aller loin l’esprit tranquille, à avoir un dérailleur, éventuellement une manette, et de quoi les changer au cas où, car il ne faut jurer de rien avec les Simplex Prestige !

 

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