BCN et BPF : Bretagne – 44 Loire-Atlantique

Share Button

.

Kilomètres réalisés : 16380
Provinces BPF validées : 22 / 36
Départements BCN validés : 54 / 91

.

Bon, je sais, Nantes ne fait pas partie de la Bretagne, et ce qu’il y a autour non plus. Pas plus que la Loire-Atlantique d’une manière plus large… En tout cas aujourd’hui. Historiquement parlant, c’est une autre affaire. Pour ces BCN/BPF qui considèrent les provinces françaises au sens de jadis, ce département constitue donc bel et bien un bout de Bretagne. Bref, un territoire qui a le cul un peu entre deux chaises, alors du coup, je le traite à part, na ! Début de printemps, beau, ensoleillé… et aux nuits à la limite du glacial dans ma banlieue parisienne. Alors comme j’ai déjà fini par rechercher quelques degrés supplémentaires du côté des Charentes, c’est reparti cap à l’ouest pour une nouvelle virée, courte celle-là, d’à peine plus d’une journée au pays des calvaires… Mais ce circuit n’en sera pas un ; le Jésus au bord du chemin est d’une nature bienveillante, d’autant que la route devrait être toute plate !

Pas envie pour cette fois de partir de Nantes comme je l’avais fait sur ma Flèche Nantes-Paris avec un ancêtre, un Cycles Gérard plus que centenaire. Comme cette fois je pars le matin plutôt qu’en début de nuit, autant s’excentrer un peu de la Cité des Ducs… de Bretagne, bien sûr ! Départ de Mauves-sur-Loire, à l’écart du plus gros de la circulation, donc. Je m’échappe de la gare par la voie verte, les bords de Loire d’un côté, une mer de moutonnements plastiques remplis de l’humidité de la nuit de l’autre. Première étape tranquille comme mise en jambes, courte, plate, entre vignobles et maraîchages largement sous serres. En sortant de la Chapelle-Heulin, je ne sais pas si le Christ est rédempteur ou non, mais il y a ici comme un petit air de Rio. Pas trop par le soleil, car le fond de l’air matinal de ce début avril reste frais, mais par la statue monumentale d’un Jésus qui nous tend les bras perché à une dizaine de mètres de hauteur, rappelant dans sa capacité à surgir et dominer le paysage, le Christ veillant sur le Corcovado. Après ce départ en douceur, arrivée paisible à Clisson, pays du Muscadet… et du Hellfest. Comme juin est encore loin, pas de braillards la bière à la main, et la vigne n’est pas chevelue non plus !

Même de loin, de l’autre côté de la ville, le château paraît très imposant, presque inscrit dans un bloc cubique. Le pointage s’impose, le ravitaillement aussi, parce que bon, le petit déj’ à 4h du mat’ pour remonter sur Paris prendre le train de Nantes… tout ça, ça fait tôt ! Passé Saint-Lumine-de-Clisson, le maraîchage puis le vignoble disparaissent vite du paysage, cédant la place aux champs cultivés et aux herbages. Ne restent comme éléments du départ que les calvaires omniprésents sur toute cette boucle. Telle la cathédrale de Chartes régnant sur la platitude de la Beauce, l’église de Saint-Philbert-de-Grand-Lieu jaillit au-dessus de la route, sa flèche visible à plusieurs kilomètres. La dernière fois j’y suis passé en fin de nuit, en faisant un petit détour lors de mes BCN/BPF du Poitou, et je dois dire que la lumière de l’aube naissante apporte un supplément de majesté à l’édifice, que la lumière crue du début d’après-midi rend plus ordinaire. Cependant, tout ça ne retire rien à la nature de cette impressionnante construction ; n’allez pas dire le contraire, car sinon, le Général de La Moricière vous attend sur son piédestal à deux pas, le sabre au clair !

Malgré un timide assaut de la vigne en sortant du village, le paysage, toujours horizontal, est largement formé de bocages. Saint-Etienne-de-Mer-Morte, curieux nom pour un village – qui n’a rien à voir avec la mer Morte, que ce soit sous une référence biblique ou géographique – et une curieuse église qui se présente, imposant au voyageur une face enduite qui ferait presque bétonnée, en tout cas froide, laide, incongrue et flanquée d’un bout d’escalier extérieur en colimaçon. Heureusement, les autres façades ne donnent pas cette impression de barbouillage inapproprié. Un peu plus loin dans le bourg, ne subsiste que le clocher-porche d’une église précédente, du XIIème siècle, dont le reste trop fragilisé a été démoli quand sa remplaçante fut terminée. Rendu à la campagne, en approche de Machecoul un tracteur laboure le fond de sa parcelle. L’air est saturé d’une odeur de bord de mer vaseux. Hallucination olfactive, promesse d’océan, il y a encore du chemin avant d’atteindre le rivage. Comme pour Saint-Philbert, ici on ne fait pas non plus dans la demi-mesure. L’église de la Trinité de Machecoul domine la platitude des environs, avec cette fois deux flèches au lieu d’une, attribut normalement réservé aux cathédrales… N’y aurait-il pas là, d’évidence, un grave péché d’orgueil ? Une chose est certaine, on ne plaisante pas avec la religion, elle imprègne toujours le territoire, comme la présence d’une multitude de calvaires et oratoires ne cesse de le confirmer tout le long du chemin. La route ondule de deux longs faux plats en approche Sainte-Pazanne, et après le village, le Moulin de Mallessard se dresse encore, tel un géant à qui on a coupé les ailes, vestige des moulins du Pays de Retz. Puis le littoral apparaît enfin, par petites touches, arrivé à La Bernerie-en-Retz. Ce tout début de printemps à déjà comme un air d’été. Beaucoup de vie dans la station balnéaire dont l’urbanisation annonce son imposante voisine : Pornic. En chemin, en s’écartant du centre-ville pris d’assaut par les promeneurs, à chaque intersection l’océan fait irruption au bout des impasses. Jeu de cache-cache, apparitions furtives dans un horizon urbain bouché.

Pornic, donc. L’accueil est un peu rugueux. Gros travaux de voirie dans toute la périphérie. Après avoir échappé à la crevaison, le centre est moins hostile, mais très grouillant dans cet après-midi ensoleillé. Beaucoup de circulation laborieuse, impatiente, cohue et déambulations dans la ville qui installe pour le week-end à venir sa fête foraine gravitant autour du carnaval de printemps. Pas envie de m’attarder dans tout ce capharnaüm. Fuir est encore la meilleure des options ! Dommage. Pas envie non plus d’arriver trop tôt au pied du pont de Saint-Nazaire pour être pris au piège du flot furieux des bagnoles. En attendant, c’est reparti sous le soleil et sous le vent. Près du littoral, le souffle ne connaissant pas d’entrave se fait bien sentir avant de couper dans les terres, cap plein nord, pour éviter l’urbanisation du bord de mer jusqu’à l’embouchure de la Loire. En fait, les quelques faux plats sur la route de Saint-Père-en-Retz sont plus gênants que le vent en lui-même. Après une route passante depuis Corsept, j’oblique pour traverser les Établissements Médico-Sociaux de Mindin, ressemblant presque à un petit village ordinaire, une station balnéaire endormie sous le feuillage d’un couvert d’arbres, donnant l’image d’une utopie capable d’accompagner ses résidents dans l’unité d’un parcours de vie rassurant… et qui sont sur le point d’être démantelés ! Petit arrêt contemplatif devant l’estuaire. Le panorama est saisissant dans son contraste entre calme et industrie. Opposition d’une rive paisible dans son alignement de carrelets et des installations portuaires de Saint-Nazaire en face, avec le pont en guise de trait d’union. Comme prévu, beaucoup de circulation en fin d’après-midi. De loin, le passage des voitures ressemble à une file indienne de fourmis sur une brindille. De près, la transhumance est plus âpre au cycliste. Le couloir étroit tracé sur le bitume sans aucun aménagement offre une protection illusoire. Univers hostile, ballotté par le vent entre le trait de peinture et la fureur des moteurs à gauche, et le béton du parapet à droite. Danse macabre. Le vélo zigzague sous le souffle et l’aspiration des véhicules sans grande latitude pour éviter de finir sous les roues ou dans le muret. La descente renforce le louvoiement et le sentiment d’insécurité. Se mettre en roue libre rend la trajectoire encore plus incertaine, instable ; garder de la motricité en pédalant rend l’avancée plus saine… mais en prenant de la vitesse elle devient d’autant plus précaire… cercle vicieux auquel je suis heureux d’échapper après les trois kilomètres de traversée ! De retour sur l’autre rive, Saint-Nazaire accueille le visiteur par le port de plaisance du Méan, minuscule oasis de calme improbable, puis aussitôt les infrastructures portuaires dantesques des chantiers navals prennent le relais. À l’inverse d’une impression de laideur, ce gigantisme, cette démesure est fascinante. Même en obliquant en transversal vers le nord-ouest pour couper toute l’urbanisation du bord de mer, la ville n’en finit pas. Contrairement à la traversée infernale du pont, celle de la ville se fait paisible. Curieux, toutes les bagnoles n’étaient apparemment qu’en transit entre les grands axes. Je poursuis ma remontée en début de soirée vers Guérande par l’intérieur des terres, sur une route redevenue plus calme.

Après une périphérie laide de zones commerciales, la cité médiévale se dévoile de toute beauté, repliée à l’intérieur de ses murs. Y flâner est très agréable dans la lumière chaude du début de soirée. Batz-sur-Mer est à deux pas, tandis que le jour baisse sur les marais salants. Le damier des œillets renvoie en teintes cuivrées et irisées les rayons du soleil couchant. La nuit s’installe lentement. Impression de sérénité à rouler paisiblement sur la petite route sinueuse parcourant cet univers paludéen, tout à la contemplation des cases d’eau nacrées et multicolores accueillant provisoirement les derniers vestiges du jour. Spectacle magique, instant privilégié. Après un chapelet de petits bourgs, la nuit a tout englouti dans ses ténèbres. Marée basse sur la plage de La Turballe. L’océan n’est qu’une possibilité, invisible au-delà du moutonnement laissé par la multitude d’allées et venues sur le sable, mutique, hoquetant seulement de temps à autre de l’échouage d’une grosse vague. Sur la route de Pont-d’Armes, la silhouette d’un moulin à vent se détache au clair de lune, ombre immobile mais qui a su garder ses ailes. Quelques faux plats se présentent sur la route d’Herbignac, et bien plus tard en approche de Guéméné-Penfao, pas le village de l’andouille – puisque nous sommes en Bretagne sans être en Bretagne, en Loire Atlantique, pas dans le Morbillan – dans les deux cas, pas d’embrouille, je ne parle pas de l’origine de l’andouille mais du profil de la route, donc, rien de bien méchant. La nuit se passe, assez déserte, avec bien peu de villages jusqu’à l’escale du Grand-Fougeray. Ce n’est pas un site contrôle de Loire-Atlantique mais d’Ile-et-Vilaine.

Un petit bonus prévu sans vraiment se détourner du chemin vers Châteaubriant. Comme je m’y arrête en fin de nuit, pas de pointage possible. Tant pis, on verra dans quelque temps, en sillonnant le reste de la Bretagne, la vraie, celle-là ! La fin de nuit est très fraîche, alors avant de repartir je profite tout de même de la halte dans le village pour acheter une pizza au distributeur, pas pour tout de suite… Pour la manger à la fin, le circuit terminé, au retour à Mauves-sur-Loire. En attendant, le carton plaqué sous ma veste servira de bouillotte en chemin, le temps que le soleil réchauffe l’atmosphère ! Cette courte étape est faiblement vallonnée, entrecoupée de longs moments plats. L’aube s’apprête à entrer en scène à Saint-Aubin-des-Châteaux tandis que Vénus, l’Étoile du Berger que j’essaie d’être en l’absence de moutons, fait de la résistance dans la lumière rougeoyante jusqu’à mon arrivée à Châteaubriant.

Il est encore tôt et la petite ville pas tout à fait réveillée. Je peux fureter tranquillement entre l’église Saint-Nicolas et le château – passer devant le Théâtre de Verre me laisse davantage perplexe, question d’ambiance – avant de repartir pour la dernière étape. Une petite montée se présente pour s’extraire de la ville, et plus loin pour passer La Butte-Saint-Ouen… Qui mérite bien son nom. Pas d’enjeu, pas d’autre difficulté, juste une soixantaine de kilomètres pour arriver à l’heure à la gare et prendre le train du retour.

.

Share Button

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *